Bitcoin ne se limite pas à envoyer des fonds d’une adresse à une autre. Derrière chaque transaction se cache un langage de script qui permet de définir des conditions de dépense plus complexes. Parmi ces conditions, les “timelocks” — verrous temporels — permettent de programmer des bitcoins pour qu’ils ne soient dépensables qu’à partir d’un certain moment dans le futur.
Les timelocks sont utilisés dans de nombreux schémas : canaux de paiement de la Lightning Network, portefeuilles de sécurité, mécanismes d’héritage, contrats de dépôt conditionnel, etc. Comprendre leur fonctionnement donne un aperçu de la programmabilité discrète de Bitcoin, en complément des discussions sur le fonctionnement de la blockchain Bitcoin.
Principe général des timelocks
Un timelock est une contrainte qui empêche une transaction d’être confirmée avant un certain moment. Ce moment peut être exprimé de deux manières :
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• Par hauteur de bloc : la transaction ne sera valide qu’à partir d’un bloc spécifique (par exemple, bloc 900 000).
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• Par timestamp : la transaction ne sera valide qu’après un certain temps Unix (par exemple, une date précise).
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Avant ce seuil, les nœuds rejettent la transaction comme invalide. Après ce seuil, elle redevient valide et peut être incluse dans un bloc si toutes les autres conditions (signature, scripts, frais) sont remplies.
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Les différents types de timelocks sur Bitcoin
Bitcoin implémente plusieurs mécanismes de timelock :
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nLockTime : un champ dans la transaction elle-même, qui indique la hauteur de bloc ou le temps minimal à partir duquel la transaction peut être incluse. Avant cela, elle sera refusée par les nœuds.
CHECKLOCKTIMEVERIFY (CLTV) : une opcode de Bitcoin Script qui permet de verrouiller une sortie (UTXO) jusqu’à une certaine hauteur de bloc ou un timestamp. CLTV agit au niveau du script, ce qui permet des constructions plus flexibles (par exemple, combiner timelock et multi-signature).
CHECKSEQUENCEVERIFY (CSV) : un timelock relatif, qui exprime un délai (en blocs ou en temps) par rapport à la création de la sortie. Il est particulièrement utile pour construire des contrats où un délai doit s’écouler avant qu’une partie ne puisse récupérer des fonds, comme dans les canaux Lightning.
Timelocks et sécurité des portefeuilles
Une des utilisations les plus simples des timelocks est d’ajouter une couche de sécurité à un portefeuille. On peut imaginer un schéma où les fonds sont placés dans un script qui exige deux signatures à court terme (par exemple, une clé stockée sur un hardware wallet et une clé stockée en coffre-fort), mais qui permet, après un certain délai, de dépenser les fonds avec une seule clé.
Ce type de montage : protège contre le vol (il faut plusieurs clés au départ), tout en offrant une voie de secours si une des clés est perdue. Combiné à des solutions de stockage à froid, cela permet de concevoir des stratégies d’héritage ou de récupération avancées.
Rôle central des timelocks dans la Lightning Network
Les timelocks sont au cœur du fonctionnement sécurisé de la Lightning Network. Dans un canal Lightning, chaque participant détient des “transactions de commitment” qui reflètent l’état actuel de la répartition des fonds. Pour empêcher qu’un participant malveillant ne diffuse un ancien état qui lui serait favorable, des mécanismes de pénalité et de timelock sont utilisés.
Concrètement, si une partie publie un ancien état, l’autre partie a une fenêtre de temps (définie par un timelock) pour prouver la tricherie et récupérer l’intégralité des fonds du canal. Sans ces verrous temporels et scripts associés, les canaux de paiement seraient beaucoup plus vulnérables aux comportements malhonnêtes.
Cas d’usage : paiements différés et escrows
Les timelocks permettent aussi de créer des paiements différés ou des escrows simples directement sur Bitcoin. Par exemple, une entreprise peut programmer un paiement de bonus qui ne sera dépensable qu’à partir d’une certaine date. Deux parties peuvent aussi verrouiller des fonds dans un script qui ne sera débloqué qu’après un délai, donnant le temps de vérifier que certaines conditions hors chaîne sont remplies.
Bien que Bitcoin ne soit pas conçu pour des smart contracts complexes comme certaines autres blockchains, ces constructions restent suffisantes pour de nombreux cas d’usage concrets, tout en préservant la simplicité du protocole de base.
Limites et précautions d’usage
Les timelocks doivent être utilisés avec prudence. Mal calculer un délai, choisir une hauteur de bloc trop précise ou mal gérer les clés peut conduire à des fonds bloqués pendant plus longtemps que prévu, voire définitivement en cas d’erreur de script.
Par ailleurs, il faut garder à l’esprit que les timelocks reposent sur l’hypothèse de fonctionnement normal du réseau et des horloges des nœuds. Les timers basés sur le temps Unix peuvent varier légèrement d’un nœud à l’autre, même si le protocole impose des bornes pour limiter les abus.
Conclusion : le temps comme dimension de programmabilité
Les timelocks illustrent la programmabilité discrète de Bitcoin. Sans offrir la complexité de smart contracts Turing-complets, ils ajoutent une dimension temporelle puissante à la gestion des fonds : différer, protéger, pénaliser, récupérer. Combinés à d’autres briques comme la multi-signature et Taproot, ils permettent de construire des schémas de sécurité et de paiement avancés, sans quitter l’écosystème Bitcoin.
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